NOTE A PROPOS DE KEREN ANN, LADY & BIRD ETC

Certains on dû se demander pourquoi je ne faisais aucune allusion à l'album "Lady & Bird" dans lequel chante Keren Ann et qui est sorti le même jour que "Not going anywhere". Et bien, la raison était que j'en savais si peu sur cet album que je n'aurais pas pu en dire deux mots.
Mais enfin, j'ai pu l'écouter et comprendre l'origine de cet album bien mystérieux...

Tout d'abord, il faut savoir que Keren Ann a clôt sa collaboration avec Benjamin Biolay après "La disparition". "Not going anywhere" ne contient donc qu'une seule nouvelle piste sur laquelle il a travaillé : Road bin.
Pourquoi la fin de cette collaboration qui semblait si fructueuse ? Selon Keren Ann, elle voulait pouvoir changer de direction, se diriger vers un style musical plus proche de ce qu'elle avait toujours voulu.
Au même moment, Bardi Johannsson, chanteur dans un groupe islandais appelé Bang Gang, prend contact avec elle. Le courant passe et il décide de collaborer ensemble dans ce qui deviendra Lady and Bird. Lady & Bird c'est donc le nom de l'album et le nom de cette formation, car cet album n'est pas une pièce isolée, mais devrait avoir une suite, enfin je l'espere...
Cette nouvelle collaboration semblant enchanter les deux parties, Keren Ann a fait une également une apparition vocale dans le dernier album de Bang Gang.

Pour résumer, la bonne surprise de tout cela, c'est que l'on peut entendre Keren Ann sur 3 albums sorti récemment : Not going Anywhere (Keren Ann), Lady & Bird (groupe Lady & Bird), Something Wrong (groupe Bang Gang).

 

CRITIQUE DE LADY &BIRD

Personnellement, "Not going anywhere" m'a un peu déçu à cause de ce léger changement de style opéré depuis sa séparation artistique avec B.Biolay. Mais ce n'est qu'une question de goût et j'appécie tout de même l'album ("La biographie de Luka Philipsen" reste tout de même celui que je préfère).
Bon, parlons de Lady & Bird, que vaut cet album fruit d'une nouvelle collaboration ? Réponse en un mot : sublime ! Bardi, le chanteur islandais a une voix qui se marie complètement avec celle de Keren à tel point qu'on ne les distingue plus à certains moments. Guitare acoustique, fond sonore très travaillé et coeur, nous rappelle le folk mélancolique auquel nous a habitué K.Ann. La nouveauté vient surtout de ces petits voix qui nous narrent l'histoire de Lady & Bird, des envolés vocales du duo, de ce petit côté pop pas déplaisant. Et la dernière piste (La ballade de Lady & Bird) est un petit bijou... Originale et très... Lady & Bird !
A noter, une reprise de Veltet Underground : Stephanie says.

Le webmaster

 

BANG GANG Something Wrong
Something Wrong. En deux mots, c'est exactement l'impression que nous avait laissé le premier album de Bang Gang, sobriquet derrière lequel se cache Bardi Johannsson depuis 1996. D'où l'enthousiasmante stupéfaction de ce disque bon et jamais mauvais, parfaitement entouré de voix féminines plus (Nicolette, Keren Ann) ou moins (Esther Talia Casey, la muse de l'inaugural You, Phoebe Tolmer) célèbres, l'islandais tisse un écrin électro-symphonique qui les sert impeccablement. Au point d'atteindre à plusieurs reprises des geysers mélodiques auxquels il est imossible de résister, et dont Forward And Reverse en compagnie de son nouvel alterego Keren Ann Zeidel consitue le point d'orgue, tout en préfigurant le projet à quatre mains Lady & Bird. Mais ce qui
sidère peut-être plus encore, ce sont les capacités vocales de Bardi sur les titres qu'il chante seul: les intonations nasales à la Billy Corgan sur les célestes It's Alright et Follow (un morceau qui n'est pas sans rappeler The Power Of Love de Frankie GoesTo Hollywood), le pouvoir d'évocation sur l'imparable Find what You Get (le tube qui manque au dernier Lp de Zoot Woman) et l'attachante reprise du Stop in the name of love des Supremes. Bang Gang ou l'histoire d'un auteur-compositeur-interprète caméléon qui, à l'aune de son deuxième LP, peut s'affaler dans les verts pâturages en vous contemplant l'air étrangement absent. L'avenir lui appartient.

Franck Vergeade (5 étoiles sur 6)

 

 

LA BIOGRAPHIE DE LUKA PHILIPSEN

Si le titre a quelque chose d'énigmatique "La Biographie de Luka Philipsen" est comme un livre ouvert. Pas de chichi et de longues digressions mais un phrasé profondément intimiste et léger qui se chuchote discrètement sur des envolées pop, hip hop, et folk yiddish ("On est loin") ou américain. Une brise discrète et sensuelle souffle sur le premier album de Keren Ann coécrit avec son compagnon Benjamin Bioley. Où ce doux filet de voix qui est le sien s'attarde entre "Jardin d'hiver" et "Dimanche d'hiver". Des ballades envoûtantes et syncopées ("Dans ma ville", "Sur le fil", qui rappellent celles du groupe Autour de Lucie) aux simples refrains qui, sur fond de violons, piano, violoncelles, célèbrent la solitude ("Seule") et l'éphémère ("Deux"), les chansons de Keren Ann s'inscrivent dans la tradition des songwriters. Un album puisé au coeur de la vie avec une infinie tendresse.

Valérie Dupouy
(source : http://www.amazon.fr)

 

 

 

Douce pop. Nouvelle venue dans le paysage sonore français, la jeune fille a voyagé. D'Israël, elle est ensuite allée aux États-Unis, en Hollande et, aujourd'hui, à Paris. Ce parcours donne un disque aux ambiances réellement internationales, évoquant ici Portishead, là Françoise Hardy, ailleurs Beth Orton. Très dépouillée, sa musique est essentiellement acoustique, quelques délicats arpèges de guitare accompagnant une voix précise, discrète et très présente à la fois. De la chanson à (joli) texte, pour sûr, parfois soutenue par quelques cordes ou instruments organiques mis en place par l'alter ego B. Biolay, subtil arrangeur devant l'éternelle (jeunesse) ! Ritournelles aux contours faussement cajoleurs et impressions de vie(s) hautes en couleurs !

Compact
(source : http://www.amazon.fr)

 

 

 

C'est notre coup de cœur du moment ! Réalisé par Lionel Gaillardin (Il était une fois) et Benjamin Biolay, qui cosigne la plupart des titres et chante en duo "Décrocher les étoiles", rarement un premier album aura fait preuve d'une telle cohérence et d'une telle maturité. Car de "Dimanche en hiver" à "Autour de l'arbre", en passant par "Jardin d'hiver" dédié à Henri Salvador, les treize titres de ce petit bijou pop distillent un climat étrange et obscur, dépeint tout en nuances par une voix suave, des textes précis et troublants, délicatement posés sur des mélodies aux harmonies classiques et modernes à la fois. Le tout agrémenté de subtils arrangements où se répondent la virtuosité de guitares, pianos, clarinettes, violons et violoncelles. À contre-courant de la production actuelle, l'univers très littéraire, presque existentiel, de Keren Ann, dont se dégagent déjà des thématiques omniprésentes comme l'ennui, la solitude ou le temps qui passe, est des plus attachants. Il inscrit la brune au visage mélancolique dans la parfaite descendance des héroïnes romantiques de la chanson, telle Françoise Hardy.

Platine
(source : http://www.amazon.fr)

 

 

 

 

Un autre article sur "La biographie de Luka Philipsen" que je ne mettrais pas dans cette rubrique car il est présenté dans une très belle mise en page : http://perso.wanadoo.fr/pensacola/Keren.html

 

 

 

 

Keren Ann : les doux états d'âme de Keren

« Un jour, une copine de Radio France m’envoie une chanson d’une demoiselle qui s’appelle Keren Ann. Evidemment, je tombe sous le charme de Jardin d’hiver, une chanson merveilleuse. » C’est Henri Salvador qui parle. La suite, on la connaît : l’album de l’élégant papy chanteur, qui compte cinq chansons de ladite demoiselle, devient disque d’or.
Depuis, Salvador n’a pas mégoté. Il a parlé à tout-va de cette jeune chanteuse-auteur-compositeur de 27 ans. A croire que Keren Ann Zeidel n’existait pas auparavant. Pourtant, en mai 2000, elle signe un bel album, un brin mélancolique et secret, empreint de folk et de blues acoustique, plus élaboré qu’il n’y paraît. Les dialogues du synthétiseur avec la guitare ou la clarinette sont riches et nuancés, les textes impeccables. Cette Biographie de Luka Philipsen (titre de l’album, chez EMI) raconte l’histoire d’une jeune fille absorbée dans ses souvenirs. Mièvre ? Du tout. C’est qu’on dit Keren Ann timide, qu’on trouve sa voix ténue, son teint diaphane. Tant pis. La demoiselle profite plutôt bien de ses origines très diverses – père juif russe, mère hollandaise au passé javanais – et sa flopée d’accents successifs, légers, contribuent à son charme. Cite-t-elle Gainsbourg, on discerne l’influence yiddish, revendiquée par le grand Serge lui-même. Chante-t-elle sur le souffle, en toute quiétude, et l’on croit entendre Suzanne Vega ou Françoise Hardy. Sur scène, ses gestes sont encore gauches mais, en première partie de M (Mathieu Chédid) ou de Joe Cocker, elle enchaîne sans difficulté les morceaux, passant de l’harmonica à la guitare. On attend déjà son deuxième album, prévu pour janvier prochain.

Arnaud Vaulerin le 20/04/2001

 

 

C'est donc avec ce premier album à peu de choses près irréprochable, accompagné la même année du retour improbable de Henri Salvador avec Chambre avec Vue, que Keren Ann (Zeidel, mais ce n'est pas obligatoire) se fait une place de choix dans la chanson française. L'année 2000 sera d'autant plus riche qu'elle accueillera dans le même temps un monsieur ô combien respectable, Benjamin Biolay, qui s'affirme un peu comme le point de ralliement de la plupart des bons projets hexagonaux des années suivantes, et dont l'arrivée inattendue est synonyme de fraîcheur libératrice pour l'haleine devenue fétide de la variété française. Aussi à l'aise à l'orchestration que sur le papier, il se joint à la talentueuse Keren Ann pour mettre en forme La Biographie de Luka Philipsen. Formule gagnante : un perfect.

Première impression, La Biographie de Luka Philipsen est un disque de nuit, où la musique scintille de ses ornements finement taillés, de ses arrangements minutieusement travaillés. Un disque à écouter le long des grandes avenues, lors d'une ballade nocturne à l'arrière d'un taxi parisien, quand le moteur est silencieux et que les lumières extérieures se reflètent dans les vitres et glissent sur le pare-brise.
Il faut reconnaître le talent énorme de Benjamin Biolay, qui a su introduire les codes des nouvelles tendances musicales dans la lignée traditionnelle de la chanson française. Les compositions, très fournies pour la grande majorité d'entre elles, forment ainsi un équilibre admirable avec la voix limpide de Keren Ann. A cela s'ajoute des textes de qualité, qui s'écoulent doucement à l'ombre de feuillages tantôt resplendissants d'espoir et d'enthousiasme, tantôt desséchés de mélancolie, jamais ridicules, jamais Céline Dion.

On assiste alors à de saisissantes ballades trip-hop, telles que le crépusculaire Dans ma Ville (bien qu'un peu trop linéaire) et surtout Aéroplane, une ode bagarreuse à la fidélité à soi-même, qui reprend au passage le punch électrique d'un Do You Believe (Cardigans). Pour rester du côté des morceaux énergiques, notons les réussites que constituent Seule et Sur le Fil, qui flirtent tous les deux avec une pop intelligente et qui nous rappellent qu'avant l'épuration quasi expérimentale de La Disparition, il y a eu une époque peut-être moins artistique, mais à coup sûr plus mélodieuse, plus vivace. Sur la totalité de ces titres, il faut voir comment B. Biolay s'empare de l'outil électronique sans jamais vulgariser le genre, pour un résultat toujours élégant.

Entre ces beaux petits accès d'enjouement, le ton se fait plus calme et laisse la chanteuse respirer un peu, donnant la parole à une mélancolie subtile et distinguée. Derrière un ensemble de cordes cristallines et de violons aériens, elle habite toute entière On Est Loin, Peut-être et le charmant Dimanche en Hiver, et retombe sournoisement sur Reste-là, un morceau grave et sans issue plongé dans le noir.
Ensuite, le duo Décrocher les Étoiles propose une belle envolée romantique qui donne une (très bonne) idée de la voix éthérée de monsieur Biolay, alors que le chaleureux Jardin d'Hiver, chanson initialement offerte à monsieur Salvador, brille de la somptueuse nostalgie qu'on lui connaît par cœur. Pour finir, jouant le rôle d'une fermeture qui lève les yeux vers l'horizon, Autour de l'Arbre construit un joli petit pont fleuri menant tout droit à la quiétude de La Disparition.

D'une manière générale, ce disque se place indéniablement sous le signe d'une production très soignée, et principalement tournée vers les tendances de bon goût du moment. Cette science maîtrisée de la composition, certains auront vite fait de l'appeler maniérisme, ou bien perfectionnisme outrancier. Il est vrai que cet aspect "léché" du son peut se retourner contre l'album lui-même, en lui ôtant toute occasion de conserver une quelconque part de mystère, de magie musicale. Mais, connaissant les aspirations davantage poétiques et la liberté du second album, on ne peut que saluer ces différences, en réservant simplement une oreille plus "esthétique" à cette Biographie de Luka Philipsen, qui reste de toute façon une révélation de grande classe.

Mad Dog, Juillet 2002
(source : http://nosurprises.free.fr)

 

Muse Salvatrice

Chantées par Salvador, les paroles de Jardin D'hiver ont tout d'une poésie du 3° âge., à la fois sereine et nostalgique. ces strophes sont pourtant celle d'une jeune femme de 27 ans, qui a sorti sa propre biographie de Luka Philipsen.

Intime et un peu suranné, le timbre de voix de Keren Ann n'est pas sans rappeler celui de Françoise Hardy. Avec son minois caché derrière des mèches brunes, elle concède par le regard en-dessous que la comparaison n'est pas pour les déplaire. En Hollande, où elle a passé son enfance, est s'est nourrie des textes de Gainsboug, Hardy, et a développé son goût pour la Folk Song au rythmes de Joni Mitchell et Suzanne Vega. Après une éducation cosmopolite-elle est née en Israël, d'un père d'origine Russe et d'une mère Néerlandaise.-, elle débarque à Paris à l'âge de 11ans. Sa vocation est déjà sérieusement ancrée. Elle qui se définie comme "une jeune fille qui a grandi dans sa chambre" commence à écrire en anglais, sa langue naturelle, et gratouille sur une guitare. Sirotant un jus de citron, elle se souvient n'avoir jamais imaginé faire autre chose que de composer des chansons. "C'était vraiment une nécessité. Mes parents m'ont d'ailleurs offert une guitare à l'age de 9 ans. Depuis je n'ai jamais arrêté". A 18 ans, le bac en poche, elle s'installe seule dans un appartement du XVIII° arrondissement , avec son huit pistes de fortune, se lance à fond dans sa musique. "Je suivais des cours de soir, juste pour ma culture personnelle, mais mon obsession, c'était la musique. Elle rejoint l'éphémère trio Shelby, tout en travaillant sur ses compositions personnelles. Finalement, elle rencontre l'homme providentiel en la personne de Benjamin Biolay, jeune musicien et arrangeur, qui cumule une culture pop et une formation classique. ils de lancent dans l'élaboration de l'album La biographie de Luka Philipsen. "Un personnage fictif, crée par Benjamin et moi. C'est aussi un hommage à ma grand-mère javanaise, qui a quitté l'Indonésie pour suivre un homme d'une autre culture. Je me sens très proche d'elle, de son destin. Nous portous tous un bout de passé des autres."

Sorti en 2000, le disque provoque une nouvelle heureuse rencontre. Keren Ann est repérée par une programmatrice musicale de Radio France, qui la met en contact avec Henri Salvador. "Une très belle rencontre...Un vrai gentleman! J'ai été très touchée qu'il me demande de chanter avec lui sur scène." confie cette jeune femme plutôt réservée, qui n'aime pas se répandre aux confidences. Elle se définie d'ailleurs comme "quelqu'un qui aime vivre à l'intèrieur et qui ne supporte pas les dîner avec plus de 4 personnes". Tout juste si elle commence à goûter au plaisir de la scène. Pourtant, elle ne cesse d'être "réquisitionnée" par des cadors de la chansons. Après Henri Salvador et Joe Cocker, elle assurera la première partie de Suzanne Vega -autre créatrice d'un Luka qui fit un succès planétaire- au Trianon, les 18 et 19 Juin.

par Yseult Williams
(source : Article de DS Magazine de Juin 2001)

 

 

La France entière vient de découvrir les talents d’auteur et de mélodiste de Keren Ann à travers les chansons lumineuses qu’elle a écrites en compagnie de Benjamin Biolay sur le nouvel album d’Henri Salvador. Avant ça, cette jeune française d’origine hollandaise a publié un album constitué des mêmes ingrédients dont il est grand temps de redécouvrir le charme délicat et le magnifique aplomb. Dans les contre-allées du folk-pop new-yorkais façon Suzanne Vega (sa référence), Keren Ann glisse comme si elle était chez elle, ose ça et là des harmonies et des arrangements hérités des Beatles, de Joni Mitchell ou de Neil Young, étale en douceur sa culture transversale (la musique kletzmer autant que Françoise Hardy) sans jamais forcer sa nature discrète. A l’heure des bécasses de la chanson québécoise et des sirènes hurlantes pour comédies musicales pompières, Keren Ann et ses chansons toutes simples peuvent constituer une protection contre l’agression ambiante.

(source : extrait des Inrockuptibles du 6 novembre 2000)

 

 

Si elle ne possède pas le timbre de voix d’Henri Salvador, a qui elle offrit une nouvelle jeunesse en lui prêtant dernièrement quelques unes de ses chansons, dont le superbe Jardin d’hiver, la toute jeune Française Keren Ann, qui publiait cette année son premier album, le très élégant La biographie de Luka Philipsen, n’est est pas moins une interprète attachante, petite cousine de l’américaine Suzanne Vega, qu’elle reprend d’ailleurs magnifiquement sur scène. 

(source : extrait des Inrockuptibles du 18 avril 2001)

 

 

Triste gaieté d'un premier album

Paris, le 3 août 2000 - Surgie de nulle part, avec des mélodies oscillant entre blues, pop, trip hop et tzigane, Keren Ann sort un album automnal en plein été… Peut-être pour nous préparer à un hiver coloré…

Une petite voix anémiée. Un visage ovale et pale. Des cheveux bruns et raides qui lui mangent la moitié de la figure. Une musique un tantinet dépressive, entre Léonard Cohen et Joni Mitchell… Keren Ann passe sa vie, semble t-il, entre New York et Paris, entre blues et spleen. Résultat, les compositions de cette jeune chanteuse de vingt-cinq ans ne sont pas promises à un bel avenir tant il est vrai que de nos jours pour avoir du succès, il faut avoir une voix bodybuildée à la Lara Fabian, arborer un sourire figé comme Céline Dion et sortir d'une comédie musicale comme (choisissez) : Julie Zenatti, Sonia Lacen, Hélène Segara… Bref, Keren Ann avec son filet de voix et son teint blafard commence mal dans sa vie d'artiste.

Et pourtant, au fil de ce premier album, on se laisse envoûter peu à peu par le timbre légèrement enroué de la donzelle… Mieux, les qualités musicales des compositions font qu'insensiblement les mélodies de Sur le Fil ou Dimanche en hiver nous restent dans un coin de la tête. La force émotionnelle d'une chanson comme Peut-Être, sorte de déclaration d'amour conjuguée au conditionnel où l'on se promet mariage naissance, foyer et amour, témoigne d'une belle maîtrise de ce sentiment amoureux et de merveilleuse incertitude. D'ailleurs tout au long de cet album, finalement savoureux, Keren Ann truffe cette galette d'un bel hymen avec le genre masculin, malgré l'adversité inhérente au genre. En témoigne ce duo avec Benjamin Biolay, Décrocher les Etoiles : "Laisse les autres parler de toi, le reste est à venir- Laisse les autres parler de moi, ils m'ont pas vu sourire". A vrai dire, le sourire n'est pas la vertu cardinale de cet album… à l'exception de ce curieux hommage à Henri Salvador, Jardin d'Hiver sans doute lié au souvenir d'enfance où l'on fredonnait Syracuse et Faut rigoler : "Les années passant, qu'il est loin l'âge tendre - Nul ne peut nous entendre".

A l'évidence, Keren Ann aime manipuler merveilleusement cet antagonisme d'une triste gaieté. Les violons langoureux ne suffisent pas à plomber cette voix enjouée, les arpèges de guitares en accords mineurs viennent en contrepoint d'un alto et d'une clarinette virevoltants. L'oxymore musical de cet album, sans jamais nous entraîner dans la dépression est aussi séduisant qu'une "robe à fleurs sous la pluie de novembre".

Frédéric Garat

 

 

La biographie de Keren Ann

Avec « La biographie de Luka Philipsen », Keren Ann livre un remarquable premier album, où fiction et mémoire familiale construisent un univers personnel et attachant.

Grand album romantique et sophistiqué, témoignant d'une étonnante maturité dans les textes (intimistes et mélancoliques) comme dans les arrangements (cordes et cuivres, guitares acoustiques et escapades trip hop), tissé de mélodies aussi évidentes que subtiles, La biographie de Luka Philipsen (EMI) est le fruit d'une heureuse rencontre. D'un côté, Benjamin Biolay, musicien de formation classique, arrangeur doué mais discret, tout juste recensé pour son travail avec L'Affaire Louis Trio. De l'autre, Keren Ann, 25 ans, jusqu'ici inconnue au bataillon. La biographie de Luka Philipsen est pourtant l'un des meilleurs disques français de ce premier semestre.

A elle seule, la vie de Keren Ann Zeidel pourrait fournir matière à un concept-album. Ça commence par un tour du monde, avec un grand-père paternel émigré de Russie en Palestine, un grand-père maternel hollandais épousant une Indonésienne aux antipodes, et sa propre naissance en Israël où se rencontrèrent ses parents. Puis Amsterdam, et à onze ans un premier séjour à Paris. « Je ne parlais pas un mot de français, se souvient Keren Ann. Mais j'ai tout de suite vu ce mélange entre quelque chose d'urbain, de moderne, et quelque chose de vieux, de nostalgique. Je me suis dit que c'était un bel endroit pour préserver une certaine intimité tout en ayant des liens forts avec des personnes autour de soi. Comme quand on se sent familier avec un endroit sans y avoir vécu ». Après des années à suivre ses parents entre France et Hollande, Keren Ann finit par se fixer seule à Paris. Elle a seize ans, le bac en poche. Suivent des petits boulots, des études d'informatique pour s'amuser (« Je suis très attachée à la numérologie cabalistique, je cherchais le lien entre cette science et cette spiritualité. Je ne l'ai pas trouvé »), des études d'océanographie à San Diego (Californie), un peu de philo et de psycho... Et toujours des chansons.

Des histoires de vie

Depuis l'âge de neuf ans et sa première guitare, Keren Ann écrit et compose en autodidacte. C'est une discipline de vie, un credo, avec pour guides Joni Mitchell, Bob Dylan, Randy Newman et Suzanne Vega. « J'avais une attirance très forte pour le folk, la chanson, l'écriture couplet-refrain, les ambiances. Le folk, ça raconte toujours des petites histoires de la vie ». Peu d'écarts de conduite, même à l'adolescence : « Je n'ai jamais fait autre chose que de la chanson, ni groove, ni funk, même si je peux apprécier ça ». Beaucoup de chansons donc, beaucoup de rencontres aussi, y compris avec des directeurs artistiques, mais à une époque où les projets « n'étaient pas forcément mûrs ». La rencontre avec Benjamin Biolay sera la bonne, elle permettra de cristalliser un talent longtemps en gestation. Ensemble, ils vont donner naissance à Luka Philipsen : Luka, comme un hommage à Suzanne Vega ; Philipsen, comme cette grand-mère maternelle dont Keren Ann s'inspirera beaucoup. « Je voulais faire depuis longtemps un album en forme d'écriture scénaristique, dans la peau d'un personnage. Benjamin et moi, on a une écriture qui se ressemble, on est arrivé à décrire des situations de la vie qui peuvent être les siennes, les miennes ou celles des gens qu'on a connus. A nous deux, on a composé une vie, il fallait qu'un personnage porte cette vie, ces différentes situations, explique Keren Ann. Mais toute cette vie, quelque part, me ressemble ». Cette jeune fille semble avoir déjà vécu plusieurs vies, à travers l'histoire mouvementée de sa famille, l'expérience de ses proches, la différence de leurs cultures respectives. « Je porte une certaine mémoire qui n'est pas forcément la mienne. On se rend compte que, dans l'inconscient, on a beaucoup plus de choses qu'on a réellement vécues qu'on ne le croit ».

Un album d'images

Si tout ça relève un peu du mysticisme, si elle emploie fréquemment l'adjectif « cosmique » (« le fait d'être un peu ailleurs tout en étant ici »), Keren Ann ne s'éloigne pas pour autant de la règle d'or de ce folk qui lui est cher : la vie et rien d'autre, une écriture simple et limpide. Très influencé par le cinéma (« la poésie crée des images »), La biographie de Luka Philipsen est un album de photos de famille. « Si j'avais besoin de décrire un temps et un lieu pour cet album, je dirais que c'est une kermesse dans un petit village au nord de la Hollande, pas très loin de l'eau. Une sensation que j'ai connue, en différents lieux, une sensation d'enfance ». Le décor est planté, en voici la saison : « Tout se passe en automne et en hiver. L'hiver, c'est ma saison à moi. La mer du Nord est mon point de repère ». Ambiances nordiques, souvenirs d'enfance : cette mélancolie, à entendre Keren Ann, aurait quelque chose à voir avec ses origines juives, avec le folk yiddish. « Ça fait partie de ma vie de tous les jours, cette façon d'aimer le passé, une certaine forme de tristesse, même quand on est heureux et gaie ». Avec Serge Gainsbourg, le folk yiddish aurait fécondé la chanson française, ce folk hexagonal incarné par Françoise Hardy ou Claudine Longet. Une tradition d'ici à laquelle Keren Ann se dit aujourd'hui fière d'appartenir.
« Je porte une mémoire qui n'est pas forcément la mienne ».

DR
(source : "Affaires Etrangères")

 

 

Matthieu Chédid a du goût. Après Franck Monnet, c'est au tour de Melle Keren Ann Zeidel d'assurer les premières parties parisiennes du trublion pop. Le rapprochement entre les trois artistes est évident. L'attrait de -M- pour les vraies chansons trouve en Keren Ann son meilleur représentant.

Il y a si peu d'artiste-compositeur interprète féminine digne de ce nom en France (ne parlons pas des Linda Lemay et autres Isabelle Boulay, Scherzo nous a dit tout le mal qu'il pensait des chanteurs québécois, et je partage son opinion) que le talent indéniable de cette jeune fille mérite d'être reconnu et défendu.
A son actif, elle a également l'honneur d'avoir contribué à la renaissance musicale d'Henri Salvador (" Jardin d'hiver ", c'est elle, et c'est d'abord elle, il ne faudrait pas l'oublier), belle performance pour une quasi-inconnue.
Mais revenons à cette " biographie de Luka Philipsen ", titre étrange. Je ne sais vraiment pas qui est ce type ou cette fille, mais il (elle) ne doit pas rigoler tous les jours. La belle partage en effet avec Franck Monnet le goût des textes mélancoliques, la solitude urbaine étant un thème récurrent de l'album (" Dans ma ville ", " Seule "). Mais le rapprochement s'arrête là.
Les mélodies de Keren Ann sont beaucoup plus " pop traditionnelle ", mélange de " songwriting " folk avec guitare acoustique, et de rythmes plus modernes, avec même des soupçons d'arrangement trip-hop, dont on sait à quel point ils s'accommodent à merveille au spleen des grandes villes. Le tout susurré d'une voix qui ne se force jamais car elle n'en a pas besoin : un timbre original, une diction tout à fait personnelle, presque désabusée (ce que Vanessa Paradis ne possèdera jamais, par exemple). Ajoutez à cela ses talents de musicienne multi-instrumentiste (guitare, clarinette, harmonica), ça fait beaucoup d'atouts pour une seule personne.
Elle a, semble t-il, trouvé un alter-ego à sa mesure, en la personne de Benjamin Biolay , qui l'accompagne sur un duo que n'auraient pas désavouer Daho ou Françoise Hardy (" Décrocher les étoiles "). Les arrangements sont délicats (beaucoup de cordes, mais légères), sans être mièvres, et toutes les compositions sont d'égale qualité.

Un sans-faute. Le tableau est élogieux mais pourtant juste. La nouvelle pop française a de beaux jours devant elle, et pas besoin des québécois pour ça !

Par Tintoretta

 

 

Keren Ann : elle a 25 ans et possède des origines plurielles. Un grand-père russe émigre en Palestine tandis qu'aux antipodes, du côté maternel, son grand-père hollandais séduit sa grand-mère javanaise pour une histoire d'amour métissée. Keren grandira en Hollande. "Luka Philipsen", titre de l'album (EMI), est un personnage virtuel que Keren a créé avec son complice musical, le compositeur et arrangeur Benjamin Biolay. Een fait c'est le mélange entre ses initiales et celles du prénom de sa grand-mère, Philipsen étant le nom de famille de celle-ci ; il résonne aussi comme un clin d'œil à la chanson de Suzanne Vega "Luka". Cette inspiration très assumée s'agrémente en France d'une sincère admiration pour Françoise Hardy ("La question" est son album culte), Henri Salvador et Serge Gainsbourg. Keren Ann adore aussi la photo dont elle a fait un hobby. Son style musical est fait de folksongs mâtinées de trip-hop. Son nom est devenu plus connu grâce au phénoménal succès de l'album d'Henri Salvador dont elle a écrit cinq chansons, dont le magnifique "Jardin d'hiver" qui figure également sur son propre album. Elle sera au Printemps de Bourges le 19 avril, puis à l'Olympia du 24 au 29 avril, en première partie d'Henri Salvador.

 

 

LA DISPARITION

 

Un autre article sur "La disparition" que je ne mettrais pas dans cette rubrique car il est présenté dans une très belle mise en page : http://perso.wanadoo.fr/pensacola/Keren,_la_disp.html

 

 

Poésie et intimisme. Telles sont les conditions dans lesquelles se fait le retour attendu de Keren Ann, deux ans après la très remarquée (et remarquable) Biographie de Luka Philipsen. Toujours enregistré en compagnie du grandissant Benjamin Biolay, qui en profite pour élargir un peu plus son champ de vision musical et pour approfondir son style de composition, La Disparition s'affirme comme une superbe confirmation des talents d'une chanteuse française à l'univers singulier, dont il faudra désormais suivre l'évolution de très près.

"Sur le fil, tout est calme et tranquille..." chantait-elle à l'heure d'un premier album esthétiquement parfait, peut-être un peu trop parfait. Un album sur lequel Benjamin Biolay étalait studieusement ses connaissances techniques et faisait parler son sens aiguisé de la composition, construisant ainsi un matelas confortable pour la voix veloutée de sa compagne. "... Sur le fil, tout est simple et facile" poursuivait-elle calmement. Ce fil, Keren Ann en est inévitablement venue à le couper en abordant La Disparition, lui et les liens qui la retenaient de partir pour un ailleurs hors des tendances du moment, vers un pays lointain qui lui serait propre. Et cela suffit amplement à expliquer pourquoi ce second album est encore supérieur à son prédécesseur.
En vérité, la beauté de La Biographie de Luka Philipsen, outre le fait qu'il abritait l'une des révélations françaises les plus réjouissantes depuis pas mal de temps, résidait dans son aspect consensuel, dans la nature même de son identité, partagée entre folk enfumé et trip-hop bien élevé. Là où ça se gatte, c'est que ce pouvoir de séduction peut finir par aveugler. J'ai moi-même bien failli passer à côté de cette profonde excursion poétique qu'est La Disparition, il s'en est fallu de peut. Seulement voilà : il souffle au cœur du dernier album de Keren Ann quelque chose de bien plus attractif que le charme ou la séduction. Là où l'un accroche l'oreille, l'autre accroche le cœur. Et, comme chacun sait, "cœur contre cœur, le cœur bat plus vite." Pour information, cette phrase, elle n'est pas de moi.

Dès les premières notes du très folk Au Coin du Monde, on comprend que La Disparition est un disque d'isolement, voire d'effacement et même de disparition, ce qui n'a rien de surprenant à en voir le titre. Cependant, l'isolement ne porte pas, chez Keren Ann, la charge de négativité qu'on lui attribue communément. Il y a un profond désir d'épuration sur ce disque, qui se ressent à la fois dans la limpidité époustouflante de la musique et dans la simplicité des thèmes rencontrés. Le premier morceau ouvre le bal en assurant que chacun a droit à son petit coin de paradis privé : "Et que la lumière soit, dans la cité qui n'en finit pas / Que vienne l'aurore, à deux pas de chez toi, à deux pas de chez moi." Plus loin, la pureté se fait reine le long des Rivières de Janvier, qui suffisent à elles seules pour guérir les maux de cœur et faire disparaître la douleur emmagasinée à la ville : "Restons ici, le soleil est moins pâle, le vent moins sidéral (...) Restons ici, les jours ne passent pas, et Paris est si froid..." Même la mort et le dégoût de l'existence ne peuvent rien contre l'innocence d'un simple baiser : "Quelque soit l'impasse, qu'importe le détour / Si tu m'embrasses, en oubliant qu'autour / La vie nous trace le chemin, le parcours..." (La Corde et les Chaussons)
Les chansons se succèdent et l'on se rend compte que dans ce disque, tout est une question de calme, de quiétude, de petits coins paisibles coupés de l'extérieur, idéaux pour venir se ressourcer lorsque le tonnerre gronde au loin, là-bas, dans la vraie vie, ou la fausse, peu importe (cf. le rêveur et lumineux Ailleurs). Rien à voir avec une quelconque forme d'enfermement. Au contraire, cette disparition ressemble plutôt à une vraie libération, oui, elle respire la liberté, sans paranoïa ni complaisance, juste le plus simplement du monde. C'est un refus de s'aligner au centre des choses, une cachette magique et poétique, une façon très subtile de dire "moi, variété française, connais pas."

A peu près chaque morceau de La Disparition évoque tout un ensemble d'images associés à des sentiments précis, et pourrait faire l'objet d'un tableau différent selon les cas, tous liés entre eux par au moins une caractéristique commune : leur ambivalence. De la beauté sidérante du Sable Mouvant, énorme pièce de collection où l'amertume quotidienne épouse des formes fantastiques renversantes, au minimalisme géant de L'illusionniste, une ballade à dormir debout dont les paroles idéalistes contrastent sévère avec la voix triste et linéaire de la chanteuse, l'album entier semble avoir été pensé dans l'idée de pouvoir jouer sur deux terrains à la fois : la tristesse subit de grands bouleversements esthétiques et devient sublime, l'insouciance vient contrecarrer les plans assassins de la fatalité, le passé rend intouchable la plus grande des beautés, le manque tue mais l'espoir fait vivre, etc... Une vaste galerie de clairs-obscurs qui culmine en fermeture du CD avec le morceau-titre, une curieuse expérience qui possède la gaieté d'une chanson pour enfants, mais qui n'a pour trame de fond rien d'autre que le suicide.

Comme un vibrant résumé de sa démarche, le disque se termine sur trois questions peu négligeables : "L'écume des souvenirs, devrais-je en rire dans le fond ? Les larmes juste pour rire, dois-je en pleurer pour de bon ? Rester ou repartir, ou bien choisir La Disparition ?" Il n'y a pas à tergiverser, tout le monde a déjà fait son choix.

Mad Dog, Juillet 2002
(source : http://nosurprises.free.fr)

 

 

Après expulsion de la Chambre avec vue d'Henri Salvador qu'elle retapissa avec raffinement en compagnie de Benjamin Biolay, son fidèle complice, Keren Ann, révélation ingénument éthérée de l'année 2000, continue à baliser sa route de folk songs mélancoliques. La Disparition, deuxième album sensuel tissé d'instruments acoustiques (guitares, cordes) et de boucles électroniques, ravive le temps de l'innocence de Françoise Hardy, Jeanne Moreau ou Jane Birkin. Tel un voyage sentimental commenté avec élégance, elle cite Mallarmé, navigue entre radeau et méduse, et vibre aux sons de la harpe de "Surannée". Et ses histoires ont le goût des amours défuntes décrites par l'homme à la tête de chou. Lumineusement crépusculaire.

Sabrina Silamo
(source : http://www.amazon.fr)

 

 

 

 

Deux ans après La biographie de Luka Philipsen, dont la sortie simultanée avec celle de son "Jardin d'hiver" pour Henri Salvador, avait permis à la jeune femme de s'imposer, avec Benjamin Biolay, comme le tandem de song-writers le plus brillant et prometteur de sa génération, Keren Ann nous livre un nouvel opus au titre pour le moins étrange. Moins conceptuel que La biographie... et plus éclaté dans son inspiration mélodique, ce nouvel opus n'en demeure pas moins remarquable de grâce et de luminosité : toujours aussi fidèle aux thèmes qui lui sont chers et confèrent à son univers toute sa cohérence (la fuite du temps, l'incommunicabilité, l'inguérissable mélancolie, la quête du bonheur...), la jeune femme aujourd'hui âgée de vingt-huit ans, semble désormais libérée de ses limites vocales, dont elle tendrait presque à jouer avec la malice d'une enfant, tout en teintant ses élégantes ritournelles sentimentales d'un humour complice et d'une distance réjouissante (cf. "Mes pas dans la neige", "L'illusionniste"). Entre autres moments de trouble partagé avec la douce chanteuse, on retiendra surtout le mariage délicat d'une guitare acoustique nonchalante et d'aériens violons sur "Au coin du monde" (premier extrait), l'original mi-Folk/mi-R&B "La corde et les chaussons", au climat à peine perturbé par un effet vocodeur bienvenu, le presque dérangeant "La disparition", et surtout "Le sable mouvant", assurément la meilleure chanson de l'album, sur la difficulté à faire silencieusement le deuil d'un amour. Autant d'instants suspendus dans le temps et l'espace qui achèvent de faire de Keren Ann une héroïne majeure de la chanson française et, même si c'est devenu un lieu commun de l'affirmer, la plus digne héritière de Françoise Hardy dans l'art difficile du chuchotement.

E.C - Platine
(source : http://www.amazon.fr)

 

 

 

 

 

Révélée au grand public après avoir cosigné avec Benjamin Biolay, une partie du dernier album d'Henri Salvador. Keren Ann revient avec" la disparition"

Keren ann n'était pas encore née qu'Henri Salvador faisait déjà le guignol déguisé en Zorro. Inconnue il y a encore deux ans, cette jeune (28 ans) auteur, compositeur a pourtant contribué à relancé la carrière de papi Henri en lui concoctant, avec Benjamin Biolay, cinq titres bossa de son dernier album de diamant Chambre avec vue, dont le tube Jardin d'hiver.

"Avec Henri Salvador, on a eu la chance de se faire connaître du grand public , dit-elle. Nous avons tous deux été récompensés et, depuis ça marche très bien pour nous!" Les deux talents - unis à la mais mais plus dans la vie - , se sont rencontrés par le biais d'un ami commun il y a 7 ans. De ce contact est d'abord née La biographie de Luka Philipsen, premier album de Keren Ann, vendu à 80 000 exemplaires, plus qu'un succès intime.

Même constat pour le disque de Benjamin Biolay, Rose Kennedy (Virgin), sacré meilleur album découverte au dernières Victoires de la musique. "J'ai aussi l'impression d'avoir été récompensée car c'est un projet dans lequel je me suis beaucoup investie", note Keren Ann. C'est donc avec son alter ego masculin qu'elle a choisi de composer son second album. " Benjamin est un arrangeur hors pair dit-elle. Il sait parfaitement mettre en avant le coté intimiste de mes chansons. Artistiquement on est vraiment en symbiose."

Née à Tel-Aviv, en Israël, d'un père russe et d'une mère Indo-néerlandaise, Keren Ann Zeidel atterrit en France à 11 ans. Avec sa guitare, cadeau des parents, elle s'initie au Folk-song en écoutant ses idoles, Joni Mitchell et Suzanne Vega. Ses premiers airs sont en anglais, mais très vite elle opte pour le français. "Le challenge est beaucoup plus interressant", assure t-elle. très sollicitée comme auteur-compositeur, elle refuse de se disperser. Tout l'inverse de Benjamin, qui accumule les collaborations avec Isabelle Boulay, Bambou et bientôt Jane Birkin. Ses textes, confondants de simplicité et brodés de mélodies intimistes, plaisent sans doute aux femmes. La "Biolay's touch". fait mouche. 

Dans la foulée Benjamin a offert à sa soeur, Coralie Clément, son premier album. Ca se bouscule au portillon dans la tribu Biolay! "Personnellement, je n'ai pas le sentiment d'appartenir à un clan, glisse Keren Ann. contrairement à ce que les gens croient, Benjamin, Coralie et moi évoluons dans des univers musicaux très différents."

 

Ingrid Phu

(source : Phosphore Mai 2002)

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